6ème jour février

La journée avait déjà bien été entamée et je faisais les cent pas dans mon bureau. Je n'étais pas rassurée à vrai dire sur la tournure qu'allait prendre l'avenir. Clerebald, mon tuteur et régent était très malade. Il s'était toujours montré d'une honnêteté et d'une loyauté sans égal envers moi et avec le temps, j'avais fini par le considérer comme un père. Je ne faisais pas partie de la famille mais c'était tout comme. Clerebald n'avait pas eu d'enfant mais j'avais toujours eu le sentiment qu'il me considérait comme son propre enfant. Je n'ai pas eu le bonheur de garder de souvenir de mon père et à chaque fois que je posais des questions sur lui, j'avais bien remarqué la gêne que je provoquais lorsque sa personne était inévitablement évoquée dans une conversation. On me cachait quelque chose, je le voyais bien et je me demandais si je voulais vraiment savoir. En même temps, ce vide dans ma mémoire, ces années dont je ne me rappelle rien me hantaient de plus en plus.

Sans Clerebald, qu'adviendra-t-il du pouvoir ? Peut-on maintenir un trône sans capitale ? Devrais-je aller m'établir ailleurs ? Certes, mais où ? Le domaine royal était complètement sous les eaux. Je n'avais clairement plus rien... Et est-ce que mon peuple me suivrait ?

C'est envahie par toutes ces pensées que je faisais des aller-retours dans mon bureau, attendant à chaque instant des nouvelles des médecins dont j'avais exigé des rapports réguliers sur son état de santé. La situation due au Cataclysme ne faisait rien pour arranger les choses. On toqua alors à ma porte. Je m'attendais à de nouveau voir le visage du médecin royal mais ce fut le chef de la garde qui entra et s'inclina avant de prononcer ces mots qui sonnent encore étrangement dans ma tête :

- Votre majesté, Thibault de Clairssac, fils du duc de Mervouinnes, vous demande audience.

- Vous pouvez le faire entrer.

De vieux souvenirs remontèrent à la surface. Tous ces moments à la Cour où Clerebald me faisait assister à des réunions afin de me former et où je voyais un petit blondinet s'amuser à faire des niches ou à embêter qui voulait bien lui prêter un peu d'attention. Je le regardais faire, amusée, sans jamais prendre part à ces jeux où il finissait le plus souvent puni. Je me demandais bien ce que le Cataclysme et les années avaient bien pu faire de lui. J'étais étonnée d'ailleurs de ne pas l'avoir vu dans les participants à mon couronnement. Je m'attendais bien à ce que toute sa famille ne soit pas présent, surtout l'aîné qui avait en général pour charge le duché en l'absence de son père. On disait qu'il était devenu très téméraire et rebelle avec les années. Une personne peu recommandable et peu fiable. Les dires étaient-ils vrais ? J'allais le découvrir assez rapidement...

Thibault était repartit de chez Fabius avec pas mal d'informations nouvelles, en particulier le fait que la Reine Adélaïde était sur le trône, et qu'elle était toujours vivante, à Fort-Espérance, depuis que la capitale était sous les eaux. Le Seigneur local l'avait escorté avec quelques hommes à lui sur une partie du trajet, puis ne voulant pas laisser le village sans protection Thibault les avait remercié. C'est donc avec ses trois compagnons de départ qu'il arriva aux portes de la cité. Une fois de plus, ce fut Roland qui s'avança, mais cette fois il sortit un titre plus prestigieux que Seigneur, car il fallait en imposer plus, ce n'était plus un village

"Voici Thibault de Clairssac, héritier d'Aristide de Clairssac, Duc de Mervouinnes ! il souhaiterait une audience auprès de sa Majesté la Reine."

Heureusement que Thibault avait trouvé le village de Fabius, car il avait pu faire un brin de toilette. Nul doute que s'il était arrivé dans l'état où il était quand il avait abordé les hommes de Solar, il aurait été évincé purement et simplement. Il ne fut toutefois pas en reste, les gardes ne le prenant pas au sérieux

"Fils du Duc, rien que ça, et moi je suis le Roy"

Les gardes présents rires de bon coeur à la blague de leur ami. Ne goutant pas à l'humour, et devant l'affront qui venait d'être fait à son Seigneur, Edwin, la plus fine lame survivante de Rochenoire, tira l'épée au clair. Aussitôt Thibault fit un pas en avant, posant sa main sur le bras armé de son garde du corps. Il avait endossé son rôle, et laissé son éducation prendre le pas, bien droit et un regard acéré à l'encontre de la soldatesque

"Il suffit !" sa voix tonna, pleine de charisme "Je suis bien Thibault de Clairssac, et je suis venu voir sa Majesté. Que pensez vous qu'elle vous fera lorsqu'elle apprendra que l'on n'ouvre pas les portes à un noble de son Royaume ?"

Les gardes de Fort-Espérance commencèrent à se regarder, le sourire effacé. Il n'était pas possible de savoir si l'homme qui leur faisait face était bien un héritier ducal, mais l'aura qu'il dégageait, son maintien, et ses manières, tendaient à prouver qu'il faisait au moins partit de la noblesse. Son armure de cuir était usagée, mais il parlait avec une autorité persuasive. Il avait été suffisamment convaincant puisqu'on le laissa entrer pour se rendre au château, lui redemandant le titre et nom qu'il fallait introduire. Ses trois hommes furent obligés de rester dans la pièce qui avait été mise à leur disposition le temps de l'attente. Quand on lui dit qu'il pouvait voir la Reine, il se fit violence pour garder la prestance que tout noble devait imposer. Il entra d'un pas décidé, et une fois devant la Reine, il fit la révérence adéquate, bien qu'un brin maladroit, avant de relever la tête, posant son regard d'émeraude sur celle qui avait endossé le titre de Reine. Il se rappelait d'elle, alors qu'enfant son père l'avait emmené à la capitale. Il avait fait les quatre cents coups, se faisant punir sévèrement à plusieurs reprises. La petite fille qui devait hériter du trône était bien calme et obéissante, un peu fade pour quelqu'un du tempérament de Thibault, mais il avait ressentit, en grandissant, la solitude qui l'entourait. Lorsqu'il avait commençé à apprendre le métier des armes sérieusement, il n'était plus revenu dans la capitale, et cela faisait donc plusieurs années qu'il ne l'avait pas vu. Il était indéniable que ce n'était plus une petite fille qu'il avait en face de lui, mais une femme, et que celle-ci était agréable à regarder. Bien que s'étant nettoyé à Solar, le voyage avait recouvert son armure d'une couche de poussière qui n'allait pas avec le titre qui était le sien. Il espérait qu'il n'avait pas trop changé, et qu'elle le reconnaitrait

"Bonsoir votre Majesté, je suis Thibault de Clairssac, est ce que vous vous souvenez de moi ?"

Voila, il était en présence de la Reine, il fallait maintenant attendre sa réaction.

L'homme que je vis entrer dans mon bureau était loin d'avoir l'apparence usuelle du fils d'un duc. Son armure avait visiblement vécu et était recouverte de poussière, due sans doute au voyage qu'il venait de faire. Je profitais qu'il prenne son temps en faisant une révérence maladroite pour l'observer.

Le reconnaître ? Comment l'aurais-je pu alors que cela faisait tant d'années que l'on ne s'était pas recroisés ? La seule chose qui me semblait désormais quelque peu familière chez cet enfant que j'ai connu, désormais homme, était son regard et ses yeux d'un vert émeraude que l'on disait ensorcelants. J'allais détourner le regard afin d'échapper à cet envoutement quand mon rang se rappela à moi. Je n'ai pas à avoir peur des hommes qui me servent mais au contraire, je dois leur montrer que je suis leur égal à chaque instant.

Pour le moment, la population de la noblesse étant ce qu'elle est, elle n'a pas encore eu trop besoin de s'affirmer, la famille de Clerebald lui étant loyale et fidèle, elle n'avait pas à s'inquiéter d'eux. Toutefois qu'en serait-il des Clairssac maintenant qu'ils revenaient sur l'échiquier ? Je choisissais néanmoins de balayer ces pensées et de me montrer un hôte des plus convenables pour le jeune homme.

- Si ce n'était par votre nom qui m'est si familier et me rappelle de si divertissants souvenirs, j'aurais pu vous croiser sans même vous reconnaître. Comment vous portez-vous et quelles sont les nouvelles de votre famille ? Le nord a-t-il beaucoup subi du Cataclysme ?

Je lui souriais et l'invitais à prendre place afin qu'il puisse se reposer un peu de son voyage. Pensant qu'il avait fait la route depuis le nord, je supposais qu'il était éreinté.

Je n'étais pas du genre à me laisser happer par les banalités d'usage et j'avais au contraire choisi d'aller droit au but. Quelque chose me disait qu'il n'avait pas été envoyé si loin de ses terres en un tel moment sans raison. Son frère aîné venait sans doute demander quelque chose. S'il souhaitait en tout cas hériter du titre de duc de son père, il allait devoir faire le voyage en personne. Je me souvins alors de ses parents. Ils avaient répondu présent, comme toute la cour pour mon couronnement. Ils avaient fait partie du convoi qui rejoignait la capitale avant que la seconde secousse ne se produise. On m'avait alors immédiatement extrait avec Clerebald du danger, me hissant au hasard sur une monture qui n'était pas mon cheval. Chacun s'était éparpillé dans la panique la plus totale. Lorsque je me rappelle la scène, c'était le chaos le plus total. Certains hommes avaient été blessés par leurs chevaux qui s'étaient cabrés sous les secousses, affolés. Certaines montures en avaient profité pour fuir. Je me souvenais d'ailleurs des chevaux qui tiraient la voiture aux armoiries du duc de Clairssac s'emballer sous l'affolement des chevaux que leur conducteur avait abandonné, sautant en pleine lancée pour sa vie. La voiture lancée ainsi à pleine vitesse avait buté sur quelque chose et s'était totalement retournée sur elle-même deux ou trois fois. Les quelques hommes encore debout avaient invité leurs maîtres à s'enfuir. La panique avait gagné tous les cœurs et les esprits et chacun ne pensait plus qu'à se mettre à l'abri, ce qui est des plus normal, je devais l'avouer. J'avais regardé tout ce chaos sans vraiment comprendre ce qui m'entourait, comme si j'étais étrangère aux choses, comme si quelqu'un d'autre le vivait. Jusqu'à ce que j'entende une voix féminine percer ce chaos et crier de tristesse. J'échangeais un regard avec Clerebald qui comprit immédiatement ce que j'allais faire avant de faire faire demi-tour à ma monture pour me rapprocher de la voiture des Clairssac. Clerebald me cria de ne rien en faire mais j'écoutais mon instinct et faisais fi de ses conseils. Je gardais les rennes de ma monture bien en main alors que je regardais dans la voiture. Jeanne, la duchesse, avait été rudement blessée à la tête et aux jambes et pleurait son mari, gisant inanimé dans une position bien étrange, les membres cassés comme un pantin désarticulé. J'exigeais alors de mes hommes de l'aide pour l'extraire de là tandis que je gardais les chevaux maintenus pour qu'ils ne s'échappent pas. Elle ne voulait pas laisser son époux mais je ne souhaitais pas partir sans elle. Tant bien que mal, ils la hissèrent sur une monture devant l'un d'eux avant de nous faire signe qu'elle était bien maintenue et qu'elle pourrait tant bien que mal faire le voyage.

Sans grande conviction, je me hissais de nouveau sur mon cheval et pris la route pour le château de Clerebald. D'autres nous suivirent, pensant que se réfugier avec nous serait leur seule porte de sortie.

D'un coup, comme dans une lumière de lucidité, je me suis dit qu'il allait sans doute me poser la question de savoir ce qu'il était advenu de ses parents, sans doute plein d'espoir d'obtenir des nouvelles d'eux. J'allais devoir malheureusement lui annoncer la triste nouvelle de la mort de son père et je cherchais dors et déjà les mots pour le lui annoncer tout en sachant que quoi qu'il arrivait, je lui annoncerai une nouvelle des plus horribles à apprendre.

Son accoutrement ne permettait guère de voir un noble, mais il misa sur sa prestance pour donner le change, son autorité naturel le démarquant d'un pouilleux de la populace. Il attendit patiemment qu'Adélaïde prenne la parole, connaissant tout de même l'étiquette. Il n'était pas rare de voir les gens détourner le regard lorsqu'il les fixait intensément, mais ce ne fut pas le cas de la Reine qui semblait, au premier regard, incarner magnifiquement son titre. Thibault avait beaucoup de questions, mais il devait freiner son tempérament fougueux pour ne pas faire d'impair devant la dirigeante du Royaume. Il se demandait d'ailleurs ce qu'il était advenu de toute la noblesse, et de la puissance royale. Allait elle être la seule à préserver assez de puissance pour tenir le Royaume, ou était-elle tombée dans une faiblesse outrageante la reléguant à une personne ne régnant que sur cette citadelle ? Les nobles se rallieraient ils à elle, en restait il seulement encore ? ou allaient ils se rebeller, et décider de tracer leur chemin sans avoir à lui obéir ? Tout cela devait peser sur les épaules d'Adélaïde, et elle devait chercher qui étaient ses alliés, ou ses ennemis. La réponse arriva, sur un ton neutre, ou elle disait ne pas pouvoir le reconnaitre, mais avoir tout de même des souvenirs de ce garnement. Il sourit en l'entendant, conscient qu'il avait dû paraitre chaotique, et comme quelqu'un à éviter lors de sa jeunesse. Pourtant elle parlait de souvenir divertissants. Il s'assombrit soudainement alors qu'elle lui demandait des nouvelles du nord. Celles qu'elle lui demandait ne la réconforterait pas forcément. Il prit une grande inspiration avant de répondre, parlant d'un ton neutre, mais résolu

"Le cataclysme n'a pas épargné le nord, nous avons été frappé de plein fouet également. Mervouinnes à été submergé par une grande vague qui a ravagé la cité" Capitale du duché, la nouvelle était donc de taille "sachez également que mes frères ainés, Arnaud et Roland, font parti des victimes. "

Le décès de ses deux frères le plaçait en tant qu'héritier direct de son père, il lui fallait maintenant poser une des questions qui était le plus pressant de son côté

"Il n'y a plus aucune information qui circule depuis, je voulais savoir si vous aviez des nouvelles de ma mère et de mon père ?"

Ne l'ayant pas lâché un instant du regard, il ne loupa pas l'air triste qui s'afficha sur le visage de la Reine. Il comprit instantanément qu'un malheur était arrivé à ses géniteurs. Il prit sur lui pour ne pas marquer le coup, mais ce fut éprouvant. Dire qu'il allait grandement pleurer son père était un grand mot, son paternel l'ayant délaissé, avant de lui chercher une utilité, il n'avait pas créer de liens très fort avec lui. Toutefois, il n'était pas insensible au point de ne pas avoir eut un pincement au coeur en apprenant le décès de son géniteur. Sa mère, en revanche, l'avait materné comme toute une mère le fait, même s'il n'était pas celui qui avait reçu toute son attention, elle n'avait pas été distante avec lui.

"Je déduis de par votre attitude qu'ils n'ont pas survécu ?"

Adélaïde expliqua alors à Thibault que sa mère n'était pas morte , lui narrant succinctement ce qu'il s'était passé.

"Les Clairssac ont donc contracté une dette à votre encontre, votre Majesté. Je vous remercie de vous être occupé de ma mère."

Dans le chaos qui s'était ensuivit, elle aurait parfaitement pu ne pas intervenir, et laisser Jeanne à son sort. L'ingratitude n'était pas un trait de sa famille. Il accompagna ses mots avec un signe de remerciement de la tête. Par contre, cela impliquait aussi de nouvelles difficultés, surtout vis à vis de la Reine justement. Le décès de son père, et de ses deux frères, le plaçait comme Duc légitime, du moins si l'héritage du sang était toujours d'actualité. Voila une situation qui les plaçait dans une situation cocasse, à savoir s'il décidait de lui prêter allégeance, et si elle acceptait dans l'éventualité ou il le faisait. Pour l'instant, il décida de ne pas parler de cela, pour voir si elle allait prendre ses responsabilités de Reine, et le reconnaitre, ou le rejeter. De son côté, il continua pour informer de la situation

"Pour en revenir au nord, depuis le cataclysme, un voile s'est installé dans le ciel, empêchant le soleil de percer comme il le devrait. Les températures chutes, et les survivants sont éparpillés en petits groupes. Bien entendu, les bandits et autres brigands se sont rués comme des chiens sur un os à ronger. Le reste de ma famille s'est réfugiée à Rochenoire, je devrais être à leur côté, mais je n'ai pas eu d'autre choix pour avoir des informations que d'entreprendre ce voyage. Nous sommes tombés sur un village de Solar, ou le Seigneur local nous a fort bien accueilli, et nous a apprit que vous étiez toujours en vie, et dans les murs de Fort-Espérance. C'est donc naturellement que je suis venu à votre rencontre, et me voila donc."

Apprendre que le Cataclysme n'avait pas non plus épargné le nord me plongea dans un profonde tristesse. De sorte que lorsque j'appris en plus que Thibault avait perdu ses deux frères aînés, je n'avais pas besoin de feindre la compassion. Je le regardai et lui prit la main avec toute l'amitié qui me caractérisait afin qu'il puisse voir combien j'étais sincère.

- Je vous prie de bien vouloir accepter toutes mes condoléances Thibault pour vos pertes.

Aussi rapidement que je l'avais prise, j'ôtais ma main afin de ne pas rompre plus que cela la bienséance qui allait maintenant devoir diriger nos rapports. Je n'étais pas sans comprendre que désormais c'était Thibault qui allait hérité des responsabilités du duché et donc devenir duc.

Je dus malheureusement lui apprendre la mort de son père et me montrait modeste pour l'aide que j'avais apporté à sa mère. Qu'il soit mon débiteur allait faire mes affaires. J'avais grandement besoin d'alliés aujourd'hui plus qu'hier encore et je saurai le lui rappeler. Bien que je ne doutais pas un seul instant que nous parviendrons à maintenir l'amitié entre la couronne et le duché du nord.

- Je vous en prie, c'était bien la moindre des choses. Dans tout ce chaos, nous serions des animaux si la solidarité ne nous animait pas.

La suite promettait d'être des plus instructives :

"Pour en revenir au nord, depuis le cataclysme, un voile s'est installé dans le ciel, empêchant le soleil de percer comme il le devrait. Les températures chutes, et les survivants sont éparpillés en petits groupes. Bien entendu, les bandits et autres brigands se sont rués comme des chiens sur un os à ronger. Le reste de ma famille s'est réfugiée à Rochenoire, je devrais être à leur côté, mais je n'ai pas eu d'autre choix pour avoir des informations que d'entreprendre ce voyage. Nous sommes tombés sur un village de Solar, ou le Seigneur local nous a fort bien accueilli, et nous a apprit que vous étiez toujours en vie, et dans les murs de Fort-Espérance. C'est donc naturellement que je suis venu à votre rencontre, et me voila donc."

Ainsi donc le nord était en pire situation qu'eux ici. Ils avaient pour le moment, le bonheur d'être plutôt épargnés par le froid, ce qui leur permettait d'anticiper sur l'hiver prochain.

- Il est fort heureux que le duché ait encore un héritier capable de prendre les choses en main. Enfin... si vous souhaitez revendiquer le titre qui vous revient de droit. En tout cas, je remercie votre famille de vous avoir laissé faire ce long voyage jusqu'à nos portes. Pour le moment nous ne disposons pas de moyen de communication, les hommes étant trop précieux. Il nous faudra remédier à cela très rapidement.

Je savais parfaitement que la pente était délicate mais je ne pouvais pas faire duc un héritier qui ne prêtait pas allégeance et je pense qu'il était à même de le comprendre. Sans couronne, pas de titre et irrémédiablement, Thibault de Clairssac et son duché basculeraient dans le camps des renégats et ce n'était souhaitable pour personne. En tout cas la mains que je lui tendais ne faisait aucun doute qu'à mes yeux il était l'héritier légitime du duché. La question ne se posait même pas dans mon esprit. J'espérais qu'il comprendrait cet appel que je lui faisais.

Pour ce qu'il était de la situation dans le nord, les choses se compliquaient et nécessiterait une réflexion sur ce qu'il était possible de faire et quelle solidarité mettre en place. Le royaume était plus que jamais un écosystème qu'il fallait mettre en place avec l'appui de tous. On avait tous besoin les uns des autres en ce moment si on voulait avoir le moins de pertes possibles et une chance de pouvoir reconstruire les choses. Sinon le chaos risque de perdurer un bon moment.

Le contact avec la Reine surprit Thibault, il ressentit la chaleur à travers la main d'Adélaïde, démontrant par ce geste, son empathie et sa compassion. Une sensation de bien être s'empara du fils d'Aristide, moment éphémère puisque déjà, la maitresse des lieux retirait sa main. Une fois l'histoire de sa parenté terminée, les mots qui suivirent ramenèrent l'héritier ducal sur terre. Il semblait qu'Adélaïde ait parfaitement endossé son rôle, puisque déjà elle rassurait Thibault dans son héritage, tout en lui mettant un ultimatum sur le fait qu'il devait rallier la couronne. La couronne avait donc trouvé une représentante à la hauteur, ou du moins en ce moment.

Peu éduqué en matière de politique, Thibault n'était toutefois pas niais. Il ne répondit pas tout de suite, prenant le temps d'évaluer la situation. Malheureusement, ou pas, il n'était pas difficile de faire un choix. La couronne était dans le mal, elle avait besoin de ses Ducs et vassaux pour continuer d'exister, et il en était de même pour Thibault, sinon à quoi se dire Duc ? autant se proclamer Roy. Mais Roy de quoi ? une petite forteresse bien mal en point, et dont les survivants risquaient de ne pas vivre bien longtemps sans aide. Il tombait sous le sens également que l'accord qu'il avait trouvé avec Fabius, la veille, ne perdurerait pas s'il refusait de plier le genou devant le Reine. Tout le monde était affaiblit, mais le fils d'Aristide ne comptait pas faire cavalier seul, il n'en avait pas les moyens , et encore moins alors qu'il était devenu le débiteur d'Adélaïde. Comme l'on était pas certain de son identité, on lui avait naturellement retiré son épée, il posa donc un genou au sol, et tout en regardant la Reine, il répondit

"Votre Majesté, si vous m'acceptez en tant que Duc de Mervouinnes, je fais le serment de vous être loyal, et de vous porter aide et conseil si vous en avez besoin."

Il était difficile de faire plus explicite comme serment, et de revendiquer un titre. Il n'en oubliait pas pour autant que si elle le reconnaissait, il deviendrait alors une figure majeure du nouveau Royaume qui allait se dessiner.

Je regardais Thibault de Clairssac s'agenouiller devant moi afin de prêter serment et me sentis satisfaite qu'il comprenne aussi rapidement que là était son intérêt. Par les temps qui courent, qui aurait donc le dessein de s'auto-proclamer Roi ? Les terres étaient détruites et tout était à reconstruire tranquillement, patiemment, avec persévérance. Il n'y avait guère que des renégats, des gens qui n'avaient rien et pensaient que par le nombre ils pourraient devenir puissants qui pourraient être assez fous pour revendiquer quelque pouvoir que ce soit. Mais y en avait-il seulement sur Estéria maintenant que tout n'était que ruines ? Je n'en savais rien et c'est d'être maintenue dans cette ignorance qui était le pire car si des mauvais coups se préparaient, je n'en aurais pas vent avant qu'il ne se produise, ce qui rendait mon quotidien très angoissant.

- Bien évidemment j'accepte avec plaisir de placer votre duché sous la protection de ma couronne et vous remercie pour la loyauté dont vous faites preuve. Recevez en retour toute ma gratitude cher duc de Mervouinnes.

Adélaïde réfléchissait à la proposition du désormais duc de Mervouinnes et se dit qu'il avait peut être une idée.

- Mon plus grand problème, outre celui des cadavres qui pullulent dans tout le royaume, c'est le manque d'information due à la rupture des voies de communication. Auriez-vous une idée pour les rétablir au plus vite ?

Je n'osais lui demander directement si des rebelles n'hésitaient pas à blasphémer contre la couronne mais je ne me permis pas d'aller si loin. Glaner des informations comme si j'étais une mendiante ou une aveugle, voilà une bien mauvaise image à donner d'une souveraine.

- Je vous avoue que pour le moment, n'avoir aucune nouvelle des duchés de l'est ni du sud me rendent assez nerveuse. J'espère qu'ils ont été plus épargnés que nous.

Elle se joignit alors les mains et jouait avec la bague sur laquelle se trouvait le sceau de la couronne, preuve de son pouvoir et de sa fonction.

Bien entendu, Adélaïde ne se fait pas prier pour accepter la serment de Thibault. Tout comme il aurait été ridicule pour ce dernier de ne pas lui prêter, il en aurait été de même pour elle de ne pas l'accepter. Ils avaient besoin l'un de l'autre, c'était l'évidence même, et par ce serment, ils étaient dorénavant liés. Intérieurement, le nouveau Duc sourit, il se demande si sa jeune suzeraine à les moyens de protéger son Duché comme elle vient de le dire, ou si elle a plutôt besoin de lui pour assoir son pouvoir ? Thibault se décide pour demander sa première faveur, alors qu'une rancune à refait surface. En effet, Mervouinnes est un vieux Duché, mais à ses yeux il est surtout celui de son père, or bien que ne le détestant pas, il n'a pas non plus oublié qu'on l'a délaissé au profit de ses deux frères ainés.

"Votre Altesse, si vous me permettez une requête ? Je pense que nous sommes à l'aube d'une nouvelle ère, et qu'il faut faire peau neuve. Aussi, j'aimerais vous demander la possibilité de renommer mon Duché ?"

Il va de soit que si elle accepte, il la laissera choisir ce nouveau nom. Ainsi il lui démontre l'étendue du pouvoir qui est celui de la couronne. En effet, s'il a décidé de ne pas faire cavalier seul, ce n'est pas pour servir une royauté faible, même si la réalité est la. Il ne faudrait pas que la nouvelle Reine ne baisse les bras. Il a besoin qu'elle soit forte, et qu'ensemble, ils redressent tout cela, et réaffirme la puissance d'Esteria.

En attendant, il a également réfléchit aux questions qu'elle lui à posé. Il vient de lui offrir son conseil en tant que Duc, mais il doit bien avouer qu'il est en peine de lui apporter. La tâche est titanesque, et elle demandera un dur labeur sur du long terme, mais comme tout haut noble, ils veulent que ça soit fait rapidement

"Votre Altesse, je suis bien en peine de vous répondre. J'entrevois deux façons de retrouver un système de communication. La première est de réorganiser les échanges par pigeon"

Les volatiles ont soudainement disparu, mais Thibault pense que c'est comme lors des migrations, et que les animaux ayant ressentit la venue du cataclysme, sont partis. Il espère donc qu'ils vont revenir sous peu

"La seconde est de sécuriser les routes, et de rebâtir des relais pour les coursiers. Malheureusement, de ce que j'ai entraperçu, nous manquons d'hommes pour sécuriser toutes les routes contre le nombre toujours plus important de brigands."

Pour la dernière demande, il avait déjà eu bien du mal à venir jusqu'ici, il était donc impensable qu'il ait des nouvelles d'autres terres

"Je n'ai aucune nouvelle du sud et de l'est, mais si vous le souhaitez, je peux envoyer des hommes en quêtes d'informations ?"

Naturellement il espérait qu'elle dirait non, car chaque homme était précieux en ce moment

"Je pense que nous devrions nous pencher sur chaque tâche l'une après l'autre. Comme vous l'avez soulevé, la priorité est le nombre de cadavre. Personnellement, j'ai fais bruler les morts autour de ma forteresse. Le temps nous manque, et les maladies n'épargnent personne, c'est donc la méthode la plus rapide, et la plus saine, pour se débarrasser de tous ces corps"

Il venait tout juste de faire serment, et d'être reconnu, et déjà ils étaient en grande conversation sur le futur du Royaume

"Il faudra rapidement s'assurer de pouvoir communiquer entre nos deux terres pour commencer, et le problème des brigands et criminels va rapidement nous submerger. il va falloir se montrer ferme et impitoyable si nous ne voulons pas voir leurs rangs grossir. Mais nous devons aussi leur apporter une solution, et de l'espoir, le seul qui peut leur être apporté, et venant de la Couronne, et de ses vassaux"

Sa première proposition me surprit mais j'en comprenais les raisons. Dans un monde totalement détruit, il est vrai qu'il n'est pas forcément nécessaire de rester enfermé dans le passé d'une ère révolue.

- Si c'est là votre désir pour vos terres, je n'y vois aucun inconvénient. Comment désirez-vous appeler désormais votre duché ?

En d'autres circonstances, j'aurais bien évidemment refusé mais plus rien n'était pareil désormais. Après tout, n'avais-je pas fait de la nouvelle capitale du royaume une terre qui ne m'appartenait même pas ? Il me faudra y remédier d'une façon ou d'une autre mais ce n'était pas pour tout de suite, ce qui me permettait d'échafauder divers plans possibles.

J'écoutais pendant ce temps, avec attention les réponses du jeune duc. En somme, il n'avait pas plus d'idée que moi sur comment gérer les choses. J'imagine qu'il nous faudra nous occuper des problèmes les uns après les autres. En attendant, de son côté, elle avait bien eu l'occasion de réfléchir aux choses.

- Le manque de communication entre nous va rapidement être un problème en effet. Reconstruire les relais n'aurait aucune utilité tant que nous manquons cruellement de chevaux. En outre, les hommes valides nous sont pour le moment trop indispensables pour nettoyer, reconstruire et surtout s'occuper des terres. Si on devait remettre en fonction les messagers ils devraient voyager à pied ce qui ne nous avancerait pas plus que si on devait se déplacer nous-mêmes.

Je l'invitais à me suivre vers la table servant usuellement aux réunions de stratégie. La carte du monde connu était déployée dessus. Je pris le symbole de Melvouinnes et le disposait à Rochenoire, la nouvelle capitale du duché. Les quelques pions qui pouvaient s'y trouvaient indiquaient les seigneurs ayant dors et déjà revendiqué leurs terres. Pour le moment, il y en avait très peu. Je regardai Thibault dans les yeux et lui indiquais les choses sur la carte en même temps que je parlais.

- Voici pour le moment ce que nous savons. Du côté ouest, l'entièreté des territoires qui constituaient le domaine royal a été englouti par les eaux. J'ai voulu y retourner et j'ai eu l'étonnement de me trouver face à la mer à une demi-journée de la frontière de l'ouest. J'ai dû rebrousser chemin. C'est pourquoi Clerebald m'avait proposé de faire du château de Camris, initialement capitale du duché de l'ouest, la nouvelle capitale du royaume que nous avons renommé Fort-Espérance.

Du coin de l'oeil je voyais qu'il comprenait parfaitement pourquoi j'ai posé si peu de résistance à sa volonté de renommer son propre territoire. J'en avais fait de même avant lui avec ce château.

- Ainsi, je gage que toutes nos terres initialement le plus à l'ouest nous isolent maintenant de nos anciens voisins par la mer. De sorte que désormais Estéria serait une île. Le désavantage est que nous ne pouvons demander d'aide à nos alliés d'hier. En revanche, l'avantage est que nous sommes préservés d'éventuelles attaques car il leur faudra beaucoup de temps avant de disposer de l'armada nécessaire à nourrir de telles ambitions. Je pense que nous pouvons tranquillement nous concentrer sur la situation intérieure sans avoir à trop nous préoccuper de ce qu'il se passe à l'extérieur de nos murs.

J'interrogeais alors du regard le duc et quitta la table avant de poursuivre.

- Dans cette optique, afin de ne pas avoir à nous séparer inutilement d'hommes, je propose que les pairs du royaume se réunissent régulièrement afin de faire le point sur la situation de chaque duché et que chacun puisse avoir une vision globale de l'évolution de la situation du royaume. Nous définirons ainsi ensemble les grandes lignes d'actions à mettre en place afin de pouvoir montrer des réactions d'ampleur plus efficaces. Disons qu'une fois tous les 3 mois à Fort-Espérance serait un bon début. Nous verrons avec le retour de la belle saison si les pigeons reviennent et nous changerons d'organisation en conséquence.

Je lui laissais le temps de donner son avis sur la question avant de préciser.

- Bien évidemment, cela implique que chaque duc sera totalement autonome sur la gestion quotidienne de ses terres mais également dans les situations d'urgence. Je crains que nous ne puissions pas faire autrement pour le moment si nous ne voulons pas être débordés.

Pour le moment, le plus gros problème était en effet les cadavres de toute une nation. J'acquiesçais lorsque Thibault m'indiqua qu'il avait fait brûler les corps pour sa part.

- Je suis contente que nous soyons sur la même longueur d'ondes sur cette question. Ce sont là les instructions que j'ai également donné de mon côté. Dès que nous aurons nettoyé les terres des morts, nous pourrons mettre en place des cultures et reconstituer du bétail afin d'aider les vivants. Reconstituer la population équestre me paraît également important. Quand sera venu le temps, il serait bon d'inciter la reproduction des chevaux en ne séparant plus les juments des étalons comme on le faisait avant. Ce sera pareil pour les têtes de bétail. J'ai conscience que nous avons encore deux mois d'hiver à tenir mais il nous faut dors et déjà nous préparer pour le prochain. Si vous avez besoin d'hommes pour vous aider dans le nord, n'hésitez pas à faire un appel aux volontaires dans les survivants qui sont venus se réfugier dans la capitale. Malheureusement, nous avons trop de bouches à nourrir et cela nous arrangera tous.

Ainsi pour répondre au problème des brigands, je gageais sur le fait que montrer que la Couronne tient bon et ne lâche rien, prépare déjà l'avenir plutôt que de appesantir sur le passé allait aider.

Adélaïde acceptait qu'il change le nom de son Duché, voila une première victoire dans la revanche qu'il prenait à l'encontre de son père et de sa fratrie. Maintenant qu'il était reconnu comme Duc, il avait tout intérêt à ce que la couronne ne soit pas faible, tout en restant lui même fort pour ne pas pouvoir être écrasé par la même couronne. Mais cela n'arriverait pas s'il prouvait à la Reine sa loyauté.

"Votre Majesté, je vous remercie pour votre consentement. J'aimerais que ce soit vous qui choisissiez le nom du nouveau Duché du nord, et que cela se sache, afin de montrer que vous avez le pouvoir de modifier des choses et de les imposer. Je pense que l'on voit encore un Duc comme une personne puissante, aussi l'impacte devrait être fort."

Imposer la Couronne est important, surtout vu l'état de faiblesse qui est la sienne en ce moment. En écoutant sa nouvelle suzeraine, il se rend de plus en plus compte de la précarité de la situation royale. Il n'avait malheureusement pas grand chose à répondre sur les voies de communication, mais quand il entendit ce qu'elle lui dit sur la situation de l'ouest, et la mer qui a recouvert la majeure partie du Duché, il comprends qu'elle est amputée de sa capitale, et de ses terres. Il l'écoute mais il n'est pas forcément d'accord avec ce qu'elle dit

"Si vous me permettez, je pense qu'ignorer l'ouest n'est pas forcément la solution. A moins que vous ne m'ayez pas tout dit, nous ne savons pas s'ils ont également été touché par le cataclysme, ou si de leur côté, ils ont conservé toutes leurs ressources. Il ne faudrait pas penser qu'ils sont dans la même situation, et se méfier, même si nous devons en effet intensifier notre travail sur l'intérieur, car c'est la seule chose à laquelle nous pouvons nous attaquer aujourd'hui. Quelques vigies afin d'être certain de ne pas subir une invasion surprise venue de l'ouest me semble approprié, même si cela implique de se priver de quelques hommes."

L'idée de se réunir était bien évidemment inévitable faute de pouvoir communiquer autrement, et cela était à double tranchant. En effet, en entendant qu'il serait libre de faire comme bon lui semblait, ce qui était déjà le cas, un Duc rendant rarement des comptes sur son territoire, il y vit l'indépendance qu'il désirait pour mettre au point ses plans. Mais en même temps, en cas de besoin, il serait donc livré à lui même, ne pouvant pas demander d'aide, ou alors par coursiers à pieds qui, si ils arrivaient à bon port, ramèneraient de l'aide bien tardivement.

"Nous réunir est inéluctable si nous voulons avancer de concert malgré notre isolement. Votre idée me semble la meilleure. Il faudra sécuriser les routes autant que possible car je vous assure que voyager est devenu des plus dangereux ces derniers temps, et il serait dommageable de perdre un Pair en ces temps troublés."

Le soucis était qu'en regardant la carte, et maintenant qu'il avait été reconnu comme Duc par Adélaïde, ils n'étaient que deux Pairs du Royaume connu à ce jour. Il faudrait impérativement avoir des nouvelles du Sud et de l'Est. La Reine voyait pourtant déjà à plus long terme en parlant du bétail, ce qui était une bonne chose pour quelqu'un de son statut.

"Votre idée est on ne peut plus perspicace, votre Majesté. Pour information, il nous reste quelques vaches et moutons à Rochenoire. J'ai malheureusement dû couper quelques têtes pour fournir viande et fourrures aux survivants, et par faute de nourriture pour les bêtes. Les pâturages sont recouverts de neige, ce qui complique tout cela. Heureusement, le Seigneur de Solar, Fabius, m'a promit du fourrage pour tenir l'hiver, bien entendu si tout cela arrive à bon port avec les routes actuelles."

Il nota également qu'elle lui offrait de prendre des personnes au sein de la nouvelle capitale pour les emmener avec lui. C'était de nouveau à double tranchant, car cela ferait des bouches supplémentaires à nourrir, ce qui n'était pas l'idéal en ce moment. Toutefois, s'il parvenait à trouver quelques personnes avec les compétences indispensables, et qu'on lui laissait les prendre, alors cela s'avèrerait utile pour la survie de sa communauté.

"J'irais voir si des gens sont intéressés, je vous demanderais de la discrétion sur la situation que rencontre le nord, sinon je pense qu'il n'y aura guère de personnes voulant se risquer à Rochenoire."

Sa proposition me surprit au plus haut point. Quand bien même je ne disposais plus du domaine royal, j'étais loin d'être sans couronne et j'avais dors et déjà l'appui du duché de l'ouest qui était comme ma famille. Qu'il puisse penser un seul instant que j'avais besoin de sa miséricorde me renfrogna quelque peu. D'un ton qui ne souffrait pas la discussion, je me contentais de lui répondre assez sèchement.

- L'important est d'être maître en son royaume. Si vous souhaitez prendre possession pleine et entière de votre duché, il vous faut vous y livrer corps et âme. Il vous revient donc d'en choisir le nom.

Je regardais avec intérêt mon interlocuteur, veillant à ce que le message soit correctement passé. Je ne voulais pas faire montre de la moindre faiblesse et qu'il suggère le contraire était parfaitement insultant.

La suite de notre conversation me détendit quelque peu. J'avais enfin l'occasion d'avoir un échange constructif avec quelqu'un sur la situation dans le royaume. Plus je le regardais et plus je constatais qu'il n'avait plus rien du jeune enfant que j'avais connu : dissipé et prêt à toutes les bêtises pour avoir de l'attention de la part de la figure paternelle. Il semblait être devenu un homme responsable, préoccupé par le sort d'autrui plus que par le sien. Il était loin de la réputation qu'on voulait bien lui donner et cela n'était pas pour me déplaire, bien au contraire. Du fait de mes responsabilités, je préférais de loin les gens fiables et les circonstances se prêtaient assez peu à laisser s'exprimer toute forme d'insouciance.

- Je comprends votre point de vue mais nous parlons là de royaumes qui jusqu'à maintenant étaient liés à de la terre et qui n'ont pas eu l'occasion dans leur histoire, de développer de compétences maritimes. Ainsi, quand bien même ils n'ont pas été touchés dans les mêmes proportions par le Cataclysme, il leur faudra tout de même beaucoup de temps afin qu'ils se munissent à la fois des compétences ainsi que des ressources pour monter une armada. Ce temps jouera en notre faveur. Tant que nous sommes à ne parler que de survivre, nous ne pouvons pas nous permettre de perdre un seul homme pour surveiller un "au cas où", je le crains.

Là encore j'asseyais mon autorité avec l'aplomb dont je disposais. Que ça lui plaise ou non, la décision était prise. Au pire, la surveillance de ces côtes revenait au duché de l'ouest et j'avais bien l'intention d'aider du mieux que je le pouvais Clerebald pour remettre le duché sur pieds au plus vite afin de pouvoir reconstituer une force armée suffisante en cas de besoin que la menace vienne de l'extérieur... ou de l'intérieur.

- Il appartient à chaque duc de veiller à la sécurité de son territoire. Les routes ne pourront pas être sécures sans ce nécessaire effort de chacun. En outre, je doute que vous comme moi, voyagions seuls et non armés. Il faudrait être fou pour s'en prendre à un personnage de haut rang placé sous bonne escorte.

J'avais ainsi replacé chacun à sa responsabilité et il n'appartenait pas à la couronne de veiller à la sécurité intérieure de chaque duché. Sa responsabilité était avant tout de maintenir l'ensemble en paix. Si elle devait s'occuper de tous les problèmes intérieurs que rencontraient les ducs en même temps que des problèmes généraux rencontrés par le royaume, elle n'aurait pas assez d'une seule journée pour réfléchir à trouver une solution à l'ensemble des problèmes.

- Je félicite cette initiative et vous en remercie. Si nous agissons ensemble nous serons plus à même de faire face aux obstacles que nous rencontrerons sur notre route. Chacun a ses difficultés mais aussi ses richesses. Il va de soit que je ne vais pas ébruiter la situation de faiblesse dans laquelle vous vous trouvez de la même façon que vous en ferez de même pour la couronne. Il ne faudrait pas rompre le délicat équilibre que nous sommes entrain de mettre en place. Il en serait fini d'Estéria et ce serait le chaos total autrement.

Thibault avait voulu être aimable, arrangeant, et se montrer loyal envers la Reine, et voila que sa première décision en tant que Duc se révélait être sa première erreur politique. Il n'avait pas été formé à diriger et cela se ressentait en cet instant. Adélaïde, fidèle à sa froideur et sa solitude de toujours, venait de l'envoyer paître sans aucune considération. Il prit sur lui et il eut beaucoup de mal à dissimuler sa déception et sa frustration, mais il y parvint in extrémiste. Il se redressa de toute sa hauteur

"Fort bien votre Majesté, mon Duché se nommera désormais le Duché d'Orzon"

Le ton était neutre mais ferme également, il avait saisi le message. Adélaïde continua d'ailleurs de l'humilier en s'opposant à tout ce qu'il avait dit. Lui qui avait un talent en matière de stratégie, le voila renvoyé dans ses lauriers comme s'il était stupide. Voulait elle donc se faire envahir sans même être au courant que des troupes étaient sur ses terres ? Et cela continua lorsqu'elle parla des routes. N'avait elle donc pas compris ce qu'il voulait dire ?

"Bien entendu que chaque Duché est responsable de la sécurité en son sein, je parlais des voyages en dehors de ceux-ci"

Par exemple, et sans être méchant, il voyait mal Fabius sécuriser les routes de son domaine vu le peu de main d’œuvre dont il disposait. Lui même n'avait guère beaucoup plus d'âmes pour le faire, et un territoire bien plus gros. De même il ne pouvait pas se démunir d'hommes pour patrouiller sur toutes les routes en sécurité avec une troupe armée, alors sur l'ensemble du Duché, c'était utopique, une tâche impossible en seulement trois mois. Nul doute que dans sa tour d'ivoire, remplie d'autant de personnes, elle n'avait absolument pas conscience de ce qu'il se passait à l'extérieur de ses murs. Et comme ce n'était pas elle qui voyagerait, la parole était aisée. Voyager sous bonne escorte comme elle le disait si bien, signifierait affaiblir la place forte et risquer de la perdre. Il ravala sa fierté et le gout d'amertume que cette conversation laissait en lui. Elle parlait d'entraide et de travail ensemble, mais elle renvoyait chacun chez soit à se débrouiller seul, quelle hypocrisie. Il regrettait d'avoir montrer un signe de faiblesse, en voyant le déni dans lequel elle s'était bercée concernant son Royaume et la vitesse à laquelle elle s'était engouffrée dans l'ouverture qu'il avait faite. On ne lui referait plus, il serait bien plus vigilant la prochaine fois. Il se drapa dans l'hypocrisie que l'étiquette imposait, n'aimant pas cela, mais se voyant contraint de le faire vu la tournure de la conversation

"Vous avez raison votre Majesté, il en sera fait selon votre bon vouloir."

Il se demandait si elle finirait par comprendre la situation globale du Royaume, et si elle finirait par considérer ses "alliés" comme ils devaient l'être, et à les respecter. Il ne parla pas plus, attendant qu'elle le fasse puisqu'elle semblait se croire si supérieur à l'un de ses pairs.

J'accueillais le nouveau nom du duché du nord avec plaisir. Afin de détendre un peu l'atmosphère je lui souris amicalement et conclu sur cette question par un compliment.

- Excellent choix votre Grâce.

Dire que j'étais exaspéré par la tournure que prenait cette conversation n'était que peu dire. Si je n'avais pas d'informations précises sur l'état du royaumes, si l'ouest et le nord étaient touchés comme il le prétendait, alors personne que ce soit la couronne ou les ducs, n'étaient en mesure pour le moment, de sécuriser quoi que ce soit où que ce soit. Vu la situation la seule chose que représentaient leurs titres étaient la capacité d'attirer à eux les survivants et de se reconstituer. Choses qui s'est un peu trop faite d'ailleurs à Fort-Espérance et il était à espérer que Clerebald continuerait à pouvoir nourrir tout le monde.

Je le laissais ainsi dans ses illusions, comme si qui que ce soit aujourd'hui était en mesure de lui prendre quoi que ce soit, comme s'ils étaient en guerre contre qui que ce soit d'autre que la mort et je préférais ne rien en dire, de peur d'engluer encore plus la situation et d'altérer cette fois-ci, les relations entre le duché du Nord et la couronne, ce qui serait bien dommage. Toutefois, si j'avais été libre de mes mots, je n'aurais pas manqué de remettre l'importun à sa place une bonne fois pour toutes et de lui intimer l'ordre de s'occuper de ses affaires et de me laisser la gestion du royaume, chose pour laquelle j'avais été formée depuis ma plus tendre enfance au contraire de lui. Le coup aurait été bas et blessant, c'est pourquoi je préférais me murer dans le silence et acquiescer à mes ordres.

- Pour en revenir à des touches plus légères. Bien évidemment, vous êtes le bienvenu en ces murs pour autant de temps qu'il vous plaira. J'imagine que vous êtes impatient de retrouver votre mère maintenant que vous savez qu'elle est en vie et je ne saurais retenir plus longtemps vos retrouvailles à moins qu'autre chose ne vous préoccupe.

J'attendais sa réponse afin de savoir si notre entretien était terminé ou s'il souhaitait s'enquérir d'autres sujets avec elle.

Dire qu'il était satisfait de la conversation qui avait lieu aurait été un gros mensonge. Thibault se sentait terriblement frustré, et intérieurement il voulait hurler. Il n'en fit rien, heureusement, prenant sur lui pour renfermer cette sensation, et se rappeler des cours qu'il avait eut sur l'étiquette et l'hypocrisie qui allait avec. Il ne riait pas, ça non, mais il parvenait à donner l'impression, ce qui était déjà une sacré victoire pour le nouveau Duc. Il apparaissait que le discussion qu'il avait avec la Reine touchait déjà à sa fin, voila qui était frustrant également. Il s'attendait à tellement plus. Il tentait de réfléchir pour voir si elle était tant dans le déni, ou si elle rusait, et rejetait consciemment ceux qui voulaient être ses alliés, voir plus.

Quand il l'entendit proposer l'hospitalité, si ce n'était la charité vu ce qu'il avait entendu depuis tout à l'heure, il fut heurté à un énorme dilemme. En effet apprendre que sa mère était vivante avait été un réconfort, toutefois, vu la situation de Rochenoire, il avait tout de suite eut l'intention de demander à la Reine si elle pouvait la garder auprès d'elle pendant qu'il tentait de redresser le Duché. Il avait même eut l'idée de ramener ses sœurs, voir son frère pour assurer l'héritage, conscient qu'il pourrait mourir dans sa tentative. Tous ses espoirs s'étaient envolés quand la Reine avait appuyé sur la plaie de la faiblesse du Duché du nord. Faire cette...ces requêtes, alors qu'en plus il était déjà débiteur, serait avouer cette faiblesse une nouvelle fois, hors il s'était décidé à ne plus le faire. il serra donc les dents

"Votre Majesté, nous ne resterons pas bien longtemps, deux jours, trois tout au plus, le temps de voir si des volontaires veulent nous rejoindre. Je vous remercie pour votre hospitalité, je vais en effet retrouver ma mère si vous le permettez, et nous la ramènerons avec nous"

Quand il se rappelait la difficulté qu'avait eu son groupe à voyager aussi discrètement que possible pour ne pas se faire attaquer, il se souciait déjà de la manière dont il pourrait ramener sa mère dans des conditions aussi déplorable ou l'on dormait dehors, sans feu pour ne pas être repérer, sauf à trouver un abris le permettant. La pauvre qui devait être sous le choc de la perte de son mari, et qui allait apprendre le décès de ses deux fils ainés, comment allait elle pouvoir supporter le voyage quand elle avait toute sa vie voyagé en carrosse, et d'auberge en auberge.

"Je reste bien entendu à votre entière disposition durant le temps de mon séjour, au cas ou vous auriez des choses à me soumettre."

Je ne sais pas comment le décrire mais je sentais d'un coup que cette entrevue avait tourné au vinaigre. Si au début leurs échanges étaient tout à fait cordiaux, on dirait désormais que son invité ne souhaitait plus qu'une chose : s'en aller. Cette perspective me désolait au plus haut point et je tentais ainsi de rattraper les choses.

- Je crains que l'état de santé de votre mère ne lui permette pas de faire un si long voyage, surtout par les temps qui courent. Je comprends aisément que vous ayez hâte de retrouver votre duché et que laisser les vôtres loin de vous soit source d'inquiétude mais si vous partez si tôt avec votre mère je crains qu'elle ne survive pas au voyage.

J'avais pris des risques pour sauver la dame de Mervouinnes, ce n'était certainement pas pour qu'elle soit tuée à cause de l'égo démesuré de son fils. La sincérité avec laquelle j'avais parlé ne laissait aucun doute sur mes inquiétudes pour une femme dont je me sentais désormais assez proche. En effet, je lui rendais souvent visite et avais pris l'habitude de venir lui faire la lecture, les migraines dues aux blessures qu'elle avait notamment à la tête, ne lui permettaient pas de profiter de son séjour et la laissaient en proie à d'intenses migraines qui l'empêchaient même pour le moment, de se tenir debout. La faire voyager dans de telles conditions relevait de l'égoïsme le plus pur.

- Reconsidérez votre décision, pour le bien de votre mère, je vous en prie. Restez tout le temps qu'il lui faudra pour recouvrer une santé suffisante pour voyager. Ce ne serait que folie de lui faire entreprendre un si long périple dans son état. Elle se tient à peine debout.

Je n'avais pas l'habitude d'insister autant pour que qui que ce soit écoute mes recommandations. D'ordinaire ma parole faisait office de loi. Toutefois j'avais tellement peur qu'il souhaite la faire voyager quand même que je ne voyais pas d'autre solution.

J'avais toujours su que le séjour de la dame de Mervouinnes ne serait que temporaire et que tôt ou tard, il lui faudrait retrouver les siens mais jamais elle n'aurait pensé que sa condition serait si peu prise en considération par ceux qu'elle avait porté en son sein avec tant d'attention et d'amour qu'ils seraient capables de risquer sa vie si bêtement.

Thibault attendait que la Reine le libère pour partir d'ici. Il n'avait pas trouvé ce qu'il désirait, et il s'était fait une raison sur le fait qu'il devrait se débrouiller seul, sans compter sur la couronne, et Adélaïde, qui semblait s'être murée en son fort intérieur, inconsciente de ce qu'il se passait en dehors des murs qui la protégeaient. Il pensait qu'elle allait le congédier, pourtant ce ne fut pas le cas. Il n'avait certes pas demandé l'état de santé de sa mère alors que la souveraine lui annonçait qu'elle ne pouvait pas voyager. Dire qu'il désirait retrouver son Duché le plus rapidement possible était la réalité, il fallait dire qu'il avait prit trois hommes avec lui, ce qui handicapait grandement Rochenoire, et il craignait qu'à son retour, la forteresse ne soit tombée, ce qui aurait auguré le pire pour ses sœurs. Il ne comprenait pas Adélaïde, elle était pleine de prestance, et elle semblait avoir de l'empathie, ce qui était une bonne chose, si seulement elle retirait les œillères qui lui couvrait les yeux concernant le monde extérieur, alors elle pourrait sans doute être une bonne souveraine. Thibault inclina la tête

"Je ne savais pas que son état de santé était si mauvais. Dans ce cas, si vous le permettez, j'aimerais la laisser à vos bons soins le temps qu'elle se remette ?"

Il ne pouvait pas attendre qu'elle soit rétablie pour commencer à redresser son Duché, le temps perdu ne pourrait jamais être récupéré, et les bandits auraient eu tout loisir de s'installer durablement.

"Bien que j'aimerais rester entre vos murs pour profiter de la tranquillité qu'ils offrent, mes responsabilités m'enjoignent de rentrer le plus rapidement possible à Orzon. Encore plus avec les injonctions que vous m'avez faites"

Il gardait en travers de la gorge sa discussion sur les impératifs à mettre en place. Savait elle seulement le nombre de survivants qui étaient avec lui ? ils n'étaient qu'une poignée, ce qui rendait d'autant plus dangereux la sécurisation qu'elle requérait dans un délai si court

"Los de notre prochaine rencontre, nous verrons dans quel état se trouve ma mère, et si elle peut alors voyager. En attendant, je vous la confie, votre Majesté."

Je me sentais fort satisfaite de le faire reculer sur sa décision impitoyable de faire voyager sa mère qui se trouvait dans un état de santé des plus préoccupants. La pauvre se remettait à peine et je ne savais même pas pour le moment quel serait l'impact sur sa santé d'apprendre que deux de ses fils étaient également décédés suite au Cataclysme. Je me sentais ainsi soulagée qu'il me demande la possibilité de confier la dame d'Orzon à mes bons soins, choses que je ne refusais pas, loin de là.

- Bien évidemment, la présence de votre mère est toujours appréciée à Fort-Espérance et nous serions ravis de prendre soin d'elle jusqu'à son complet rétablissement. Vous savez, elle est passée par des moments terribles. Elle se recouvre à peine la santé et présente de nouveau un peu d'appétit mais nous avions bien pensé la perdre la semaine passée. Tâchez de la ménager autant que vous le pouvez lorsque vous lui apprendrez les sombres nouvelles venues du nord.

Bien évidemment, j'étais la première à comprendre combien il était important pour un seigneur de répondre présent pour ses gens. Certes, je n'avais plus de terre à moi mais avec Clerebald malade, je gérais maintenant quasiment entièrement Fort-Espérance et ce n'était pas une mince affaire.

- Je m'en voudrais de contrecarrer les dessins que vous avez pour Orzon en vous retenant ici plus que nécessaire.

Ainsi, je le laissais prendre congé à sa guide et levais notre audience. Visiblement nous n'étions pas parvenu à nous comprendre. Il ne me restait plus qu'à laisser le temps montrer au duc d'Orzon combien il faisait erreur en s'attendant à ce que le royaume soit assiégé à tout moment. Prudence était peut être mère de sûreté mais elle demandait trop d'efforts aux duchés pour le moment. Que chacun puisse garder un maximum de survivants en vie serait déjà beaucoup.

Je n'étais pas sans savoir qu'une fois que les survivants allaient apprendre que les duchés avaient de nouveau quelqu'un à leur tête, ils allaient accourir dans ces lieux dans l'espoir qu'on leur vienne en aide. Nourrit tout ce monde deviendra alors une lutte de chaque instant. Il leur faudrait anticiper les choses et se montrer malins.