Estéria et ses terres

Le Royaume d'Estéria a vu toute sa partie occidentale engloutie sous les eaux lors du grand cataclysme. Un bras de mer sépare désormais Estéria de ses anciens voisins occidentaux, recouvrant d'anciennes plaines fertiles, dont le site de l'ancienne capitale. Quelques îlots surnagent à l'Ouest de la nouvelle étendue d'eau, ainsi qu'au Nord.
Des rumeurs les disent habitées. Mais ce ne sont que des rumeurs. La plupart des navires n'ont pas résisté et seules quelques petites embarcations de pêche se risquent encore à aller sur l'eau, plus pour ramener de quoi subsister aux populations côtières que pour mener des explorations ou des conquêtes.

Concernant le territoire d'Estéria proprement dit, il faut bien distinguer différentes régions, chacune étant marquée par des particularismes géographiques .
Ainsi, il faut bien différencier les terres de l'Ouest, du Nord, de l'Est, et du Sud.

Le Nord, ou plutôt ce qu'il en est  resté rattaché au continent, est un territoire relativement inhospitalier, et ce depuis toujours. Constituée de hauts plateaux, et d'une chaîne de montagnes aux vallées très encaissées, cette zone est exposée à un climat froid, pour ne pas dire polaire. 
Cette région a forgé une population austère, aux mœurs dures et rugueuses, mais peu nombreuse. C'est une des parties de la population qui a été peut-être la moins touchée, les montagnes ayant en quelque sorte fait barrage à la montée des eaux qui a quand même inondé le fond des vallées, et submergé les petites villes et villages qui s'y trouvaient. Mais l'eau s'en est assez rapidement retirée, laissant les quelques villages sur les hauteurs à peu près intacts, mais les tremblements de terre les avaient déjà bien affectés. 
Depuis le désastre, la région est en proie à un grand refroidissement climatique. Le ciel semble s'y être obscurcis d'un voile gris, à travers lequel le soleil à de plus en  plus de mal à percer. Les neiges hivernales et le froid, eux, ne se retirent pas, et les régions nordiques sont comme endormies sous un hiver durable, rendant la survie des rescapés du désastre particulièrement difficile.

L'Ouest n'est l'Ouest que depuis peu. Ce qui était jadis considéré comme la partie occidentale du Royaume d'Estéria est aujourd'hui submergé et noyé sous les eaux, dont l'ancienne capitale, Chyrellos (prononcer Kirélos), aujourd'hui perdue avec tous ses habitants. 
De l'Ouest, il reste surtout la région des lacs, une zone baignée par plusieurs grands fleuves, certains prenant leur source dans de grands lacs plus au Nord. Avec les inondations massives de la région, et une pluviométrie accrue, des parties entières de la contrée se sont transformées en vastes bourbiers marécageux, particulièrement difficiles à cultiver car bien trop détrempés. Jadis pleines fertiles, les pillages vont bon train pour s'accaparer ce qui peut encore servir pour la survie. C'est aussi l'une des parties du Royaume où l'on peut compter le plus de survivants, et on l'on trouve la nouvelle capitale: Fort-Espérance.

Au Sud, les côtes ont été entièrement redessinées par le raz-de-marée et la montée des eaux. Les côtes actuelles étaient autrefois à une vingtaine de kilomètres en moyenne des eaux, et la splendide flotte d'Estéria n'est aujourd'hui plus que débris flottants au gré des flots. Trouver un port en eaux profondes est donc impossible à ce jour, et aucun véritable navire, si tant est qu'il en reste quelque part, ne pourrait s'approcher du rivage sans s'échouer à plusieurs centaines de mètres des nouvelles côtes.
Cette région est particulièrement meurtrie, et c'est sans aucun doute elle qui a enregistré le plus de pertes lors du grand raz-de-marée, venu par le Sud-Ouest. Les grands ports de jadis ne sont plus que ruines englouties, et de leurs centaines de milliers d'habitants, il ne reste plus que quelques survivants errants et hagards, ayant tout perdu.
Cette région de plaines et de collines voit aujourd'hui fleurir de nouvelles communautés, plus ou moins bien structurées et importantes, qui cherchent à reconstruire un semblant d'ordre. Mais du fait de l'ancienne richesse de ces terres, c'est aussi un terrain privilégie pour les pillards de tout poil.

A l'Est se trouve la contrée que l'on appelle la Grande Lande. Ce territoire est sans doute celui qui a été le moins touché par les  cataclysmes successifs qui ont ravagé le Royaume d'Estéria. Hanté par les meutes de loups depuis des temps immémoriaux, ces grandes étendues herbeuses étaient par le passé le refuge des brigands de tout poil qui souhaitaient se tenir à l'écart de la civilisation et se faire oublier. Les bergers qui y vivaient  occupaient de petits villages, sous l'autorité de seigneurs sans grande puissance, parfois occupés à se quereller pour quelques arpents de terre cultivables. L’existence y était déjà dure et précaire. Mais à présent, la brume baigne de plus en plus souvent la Grande Lande, et les loups, de plus en plus affamés, mènent la vie dure aux troupeaux et aux voyageurs esseulés. 
Ce territoire est à présent synonyme de peur, et de mystère. Une terreur indicible et bien ancrée s'est imprégnée dans le cœur des habitants, qui se sentent pris au piège sur leurs propres terres. Car prendre la route, seul ou en groupe à travers la Grande Lande, c'est entreprendre un voyage dont beaucoup ne reviennent pas.