Je n'en pouvais plus de ces marécages !
De la boue, toujours de la boue et encore de la boue !
A croire que les terres de l'est n'étaient désormais plus que cela !
Mes vêtements étaient désormais lourds à porter à cause de cette couche boueuse et relativement pestilentielle qui venait sans cesse se déposer sur mes chaussures et mon pantalon.

Au petit matin, alors que tout le monde était endormi, je décidais d'en profiter pour aller à la rivière que j'avais repéré non loin afin de me laver. Je ne risquais pas ainsi d'être surprise dans le plus simple appareil. Il faut dire que jusqu'à maintenant, je n'avais jamais vraiment expérimenté le regard qu'un homme pouvait avoir sur une femme. Durant mon enfance, on me regardait toujours comme une bête curieuse à cause de mes cheveux roux. ensuite, Sylvain était trop vieux et rien que d'imaginer son regard posé sur moi à imaginer peut être d'autres choses que ce qui n'était permis par la bienséance, m'inspirait un dégoût particulièrement profond. Adrien notre nouvelle connaissance, aurait pu tenter chez moi des pensées impurs, étant bel homme mais il ne m'inspirait que trop peu confiance alors je passais plus de temps à me méfier de lui qu'à penser autre chose.

J'étais donc partie, m'aidant encore de mon bâton pour marcher quand les vertiges étaient trop importants sans crier gare. Je n'avais rien emmené d'autre avec moi afin qu'on ne puisse pas me voler quoi que ce soit. Près de la rivière, je me déshabillais et fut quelque peu saisie par le froid. J'oubliais parfois que l'on était encore en hiver. Toutefois l'odeur qui se dégageait de mois me convainquis de poursuivre mon opération et de faire fi de la froideur de l'eau sur l'autel de la propreté. Celle-ci était aussi froide que je m'y attendais mais à mesure que je bougeais dans l'eau, je me sentais me réchauffer. Ou peut-être n'était-ce qu'une impression ?

Lorsqu'enfin seule ma tête sortait de la rivière, un léger gémissement de satisfaction se fit entendre. Comme il était bon de se délasser ainsi ! Je plongeais une ou deux fois la tête dans l'eau et secouais ma longue chevelure rousse afin de laver quelque peu mes cheveux que je n'avais pas encore eu le plaisir de démêler puisque je ne suis pas parvenue à trouver ce qu'il me fallait pour le faire. Nous n'en étions plus à ces préoccupations superficielles dorénavant et je l'avais bien compris. Toutefois ma blessure à la tête faisait que je n'avais pas encore eu le loisir de retirer le sang séché de ma tignasse. Même si Sylvain avait pris sur lui de nettoyer ma blessure mais le reste n'avait pas d'importance à ses yeux, si bien que je sentais parfois en touchant mes cheveux, de la croûte s'être attachée à ma chevelure.

Bref, j'étais dans un piteux état ! Celui d'une femme qui avait survécu au pire et qui avait erré des jours sans avoir rencontré le moindre être vivant avant de tomber par chance, sur un vieil homme bienveillant qui fit de son quotidien, la mission de me maintenir en vie et de m'aider à trouver ma voie (même s'il était convaincue que celle-ci passerait par la religion, ce à quoi je me refusais).

Alors que je me délectais de ce moment de solitude, j'entendis des bruissements d'herbe caractéristiques de quelqu'un qui passait par là. Afin de faire peur (ou en tout cas je l'espérais), j'interpellais ainsi l'intrus, me tenant sur mes gardes, prête à bondir sur mon bâton pour me défendre.

- Eh là ! Qui va là ! Montrez-vous si vous tenez à la vie !

J'attendais avec intérêt la réponse qui me serait faite.